Il était temps.
Après avoir donné mon avis sur à peu près tout, de la voiture électrique à la fusion entre FCA et PSA, raconté comment ça se passe au Brésil entre les voitures qui boivent de l’alcool et les Alpine qui y ont été construites sous licence, expliqué que Jésus roulerait en pick-up d’occasion et que Paul Bocuse avait un Mercedes Classe G, il était temps que je vous écrive quelque chose de vraiment utile.
C’est pourquoi j’ai décidé de clore cette série estivale de trois chroniques qui m’a d’abord vu philosopher sur la route des vacances avant de déclarer mon amour pour un constructeur japonais par un guide d’achat des voitures d’été.
Bien entendu, j’ai en préalable définit un Cahier des Charges rigoureux, indispensable à la rédaction de ce type de document, dont je vous livre immédiatement les contraintes. A commencer par la condition sine qua non sans laquelle une automobile ne saurait être considérée comme estivale, autrement dit l’absence d’habitacle confiné. Mais attention ! Il est ici question de voiture découverte plutôt que découvrable, et les cabriolets cossus, équipés de capote triple épaisseur ou -pire encore- de toit rétractable ne sauraient être retenus. En revanche, une vilaine bâche cousue par un stagiaire reste acceptable.
Dans le même ordre d’idée, les critères bassement matériels et autres considérations d’ordre pratique ont été totalement ignorés. En été, on est là pour s’amuser, pas pour s’achaler avec les dm³ de la malle à bagages. Pour autant, vous ne trouverez ni concept-car, ni show-car, ni autre engin de salon dans cette liste, puisque tous les modèles cités sont susceptibles de faire l’objet d’une acquisition, quitte à devoir dévaliser une banque ou convaincre par intimidation un propriétaire récalcitrant de s’en défaire.
Et bien sûr, je me donne le droit de ne pas respecter ces critères à la lettre, puisque c’est ma chronique et que j’y écris ce que je veux.
Les prérequis étant connus, voici donc ma sélection (dont les photos figurent au bas de cette page) :
Toute automobile antérieure à 1904
Qu’on se le dise, l’automobile est née estivale. C’est en effet avec des peaux de bête, couvre-chefs en cuir et lunettes biseautées que les pionniers de la locomotion individuelle se protégeaient des frimas, mais aussi des nombreuses projections dont les routes alors sommairement revêtues n’étaient pas avares. Louis Renault sonna néanmoins le glas de cette glorieuse époque, en proposant en 1904 la première automobile à "conduite intérieure" isolant le chauffeur des intempéries et de la froidure. Les modèles antérieurs à cet embourgeoisement regrettable constituent donc un excellent choix pour la saison d’été, auxquels on pense beaucoup trop rarement.
- Avantage : Permettent de participer à la course historique Londres-Brighton réservée aux véhicules d’avant 1905, réalisée chaque premier dimanche de novembre les années hors-Covid.
- Inconvénients : Garantie constructeur révolue, et service client souvent inexistant.
- Choix alternatif : une voiture à cheval non-vapeur.
Fiat 500 Jolly
Version la plus déshabillée du célèbre "vasetto di yogurt" construite par le carrossier Ghia à partir de 1957, la Fiat 500 Jolly constitue non seulement un engin idéal pour l’été, mais aussi la représentante la plus célèbre de la catégorie dite des "voitures de plage". Truffée de détails croquignolets, celle-ci peut être équipée d’un taud frangé délicieusement kitsch, ou de charmants sièges en osier particulièrement pratiques pour rejoindre la suite au Negresco après le bain de mer, sans passer par la case séchage du maillot.
- Avantage : note maximale sur l’échelle de la "coolness", même en plein cagnard.
- Inconvénient : La trame en osier marque durablement le fessier.
- Choix alternatifs : pour les plus chauvins, existe sur base Renault 4CV, de préférence en rose barbe-à-papa. Pour les modernistes, la Fiat 850 Shellette repris le même concept en 1969, ajoutant aux sièges en osier la planche de bord dans le même matériau.
Morgan Plus 4
Je sais, le célèbre roadster britannique dispose d’un toit en toile. Mais croyez-en mon expérience, la voiture n’est pas hermétique, témoignant d’une absence de savoir-faire en matière d’étanchéité quelque peu étonnante de la part d’un peuple vivant sous les draches environ un jour sur deux. Un conseil pratique : l’envers de la capote étant exposé aux intempéries, ne vous avisez pas de la fermer au milieu d’une ondée, sous peine de vous faire arroser par les gouttes y étant stockées au premier passage de ralentisseur. Vous passerez pour un imbécile et l’âne aura bon dos. En dehors de ces détails mineurs et des trois essuie-glace au balayage pathétique, le look années 30 de la Morgan ne vous attirera que des regards sympathiques lorsque le soleil sera revenu, et peut-être plus si affinités.
- Avantages : capable de provoquer le coup de foudre.
- Inconvénient : ne résiste pas aux orages.
- Alternative : la même avec un moteur V8 propose 367 ch pour s’emplataner avec style.
Chamonix 550 Spyder.
Il s’agit de la réplique de la Porsche 550 Spyder fabriquée au Brésil, dont j’ai eu le plaisir de posséder un exemplaire. Elle aussi dispose d’une capote, mais livrée en pièces détachées et faisant passer celle de la Morgan pour un chef d’œuvre d’ingénierie. Une fois que vous aurez réussi à la monter, l’averse tropicale arrivée par surprise sera terminée depuis longtemps, ce qui n’empêchera pas la visibilité résiduelle offerte par les minuscules vitrages de disparaître en quelques secondes. La chaleur dispensée par le moteur en position arrière et les durites d’eau logées dans le châssis tubulaire le reliant au radiateur produisent en effet une buée à faire pâlir d’envie n’importe quelle centrale à vapeur. Si vous échappez à l’accident, il vous faudra encore replier la dite capote et la ranger dans le logement théoriquement prévu à cet effet sous le capot avant, opération qui vous dissuadera à tout jamais d’y toucher à nouveau. Le reste du temps, l’engin est un vrai bonheur, et vous fera passer pour une star du grand écran.
- Avantage : le look de la voiture de James Dean
- Inconvénient : il s’est tué avec.
- Choix alternatifs : le Spyder 550 original construite par Porsche entre 1952 et 1955. Mais prévoyez 3 à 5 millions de dollars, en admettant que vous arriviez à convaincre Ralph Lauren de vous céder la sienne. Sinon, un sauna suédois fera également l’affaire.
Citroën Méhari
La voiture qui s’adresse au babacool sommeillant en chacun de nous, ce qui n’a pas empêché son lancement organisé le 11 mai 1968 sur le Golf de Deauville de passer totalement inaperçu. Sa carrosserie hésitant entre pick-up et cabriolet n’en est pas moins idéale pour les partisans du faire-l’amour-mais-pas-la-guerre, avec des bâches de toit et latérales offrant un minimum de privacité si nécessaire. Conduite de préférence en pantalon pattes d’eph et chemise col pelle à tarte, la petite Citroën prouve qu’avec une plastique loin d’être parfaite malgré sa carrosserie en acrylonitrile butadiène styrène (ABS), on peut tout de même devenir une icône.
- Avantage : Le plastique, c’est fantastique et lavable au jet d’eau, y compris à l’intérieur.
- Inconvénient : l’autoradio quand il y en a un, n’est audible qu'à l’arrêt, le vacarme provoqué par le bicylindre de la 2 chevaux couvrant largement l’enregistrement cassette du Festival de Woodstock.
- Choix alternatifs : La Renault Rodeo : même concept avec deux cylindres et des poneys en plus (jusqu’à 47, comparés au 29 de la Méhari), ou la Mini qui se Moke pour les anglophiles.
Renault 4 Plein Air :
Avant la Rodeo précédemment citée, il y eut la Renault 4 Plein Air fabriquée -ou plutôt découpée- par la Société Sinpar, dont le process industriel consistait essentiellement en l’ablation du toit et des portières de la paisible berline. Il faut dire que le Département style de Sinpar était probablement composé d’un unique intérimaire, puisque l’entreprise produisait en temps normal des transmissions 4x4, 6x4 ou 6x6 pour camions. Ce n’est néanmoins pas le style, au final plutôt sympa, qui limitera sa diffusion (semble-t-il à 563 exemplaires), mais son prix à l’époque très élevé par rapport à celui d’une Méhari.
- Avantages : Pièces de rechange particulièrement faciles à trouver pour une auto exclusive, y compris les chainettes remplaçant les portières, disponibles chez le quincaillier du coin.
- Inconvénients : vos voisins penseront que vous l’avez construite vous-même.
- Alternative : La JP4 de la Société Car System, réalisée ultérieurement selon le même principe, avec extensions d’ailes en plastique moches en plus.
Renault Spider
Le Spider, c’est la voiture d’été des sportifs purs et durs. Des gars considérant qu’un pare-brise constitue un équipement de confort méritent d’ailleurs notre respect, même si celui-ci équipa tout de même la majorité des 1.726 exemplaires construits entre 1995 et 1999. A bord, l’austérité règne dans un habitacle ne disposant que du minimum légal. Itou sous le capot avant où un bac de plastique type "marché à la criée" accueille des bagages certains d’être mouillés en cas de pluie. D’ailleurs, le Spider sort sans capote, même si en cherchant bien, il doit encore être possible de trouver l’accessoire vendu à l’époque par Renault Boutique comme "parapluie", auto-déchirable au-dessus de 80 km/h.
- Avantage : Les portes s’ouvrant en ailes d’élytre vers le haut vous donnerons l’illusion d’entrer dans une Lamborghini.
- Inconvénient : le 2.0l 16 soupapes de 150 chevaux vous rappellera que ce n’est pas le cas.
- Choix alternatif : une Caterham, continuation de la légendaire Lotus Seven, encore plus radicale.
Buggy Bugre
Deuxième modèle brésilien de ce guide avec la Chamonix, le Buggy Bugre en est à sa 7e génération, puisque l’entreprise fondée dans les 70’s existe toujours, à 90 Km de Rio. Préférez néanmoins les modèles 1 et 2 des débuts, esthétiquement plus réussis avec le look de batracien caractéristique de la catégorie, mais qu’il vous faudra presqu’obligatoirement restaurer puisque les exemplaires subsistant sont généralement rincés. A l’inverse des voitures de plages citées précédemment qui resteront prudemment sur le bitume, le Bugre ne craint pas le sable avec ses gros pneus ballon à l’arrière. On les trouve d’ailleurs en nombre à Natal, ville du Nordeste brésilien où les chauffeurs locaux emmènent les touristes faire des acrobaties dans les dunes.
- Avantage : Ideal pour grimper la Dune du Pilat.
- Inconvénient : la Dune du Pilat est interdite aux voitures.
- Alternative : Le buggy Manx originel, à importer de Californie.
Aro Spartana
La Spartana est à la voiture de plage ce que le Duster est au SUV. Ça tombe bien puisqu’elle possède les mêmes origines, et que ses composants mécaniques proviennent de chez Dacia époque pré-Renault, mais Renault quand même. Même si votre roumain est aussi rouillé que le mien, j’imagine que vous n’aurez pas besoin de Google pour traduire le nom de l’engin, qui a au moins le mérite de l’honnêteté. C’est vous qui voyez. Notons tout de même l’intéressante version 4x4, ancêtre très lointain des Land-Rover Evoque et autres VW T-Roc cabriolets.
- Avantage : votre contrôleur des impôts renoncera immédiatement à vous embêter en la voyant.
- Inconvénient : vos voisins aussi penseront que vous n’êtes pas imposable.
- Choix alternatif : un ticket de bus, si possible le genre touristique à double étage découvert.
McLaren Elva
A l’exact opposé du modèle précédent, la McLaren Elva s’adresse à ceux à qui l’administration fiscale s’intéresse, puisque ses clefs s’échangent contre un chèque de banque de 1,7 million d’euros. A ce tarif, le V8 biturbo de 815 ch vous emmènera de 0 à 200 km/h en 6,7 s, mais sans déplacer une mèche de vos cheveux, grâce à "l’Active Air Management System". Ce dispositif aérodynamique complexe détourne en effet les flux d’air de l’habitacle, permettant ainsi de faire l’économie (sic) du pare-brise, du toit et des vitres latérales.
- Avantage : Avec seulement 249 exemplaires prévus, votre voisin n’est pas prêt d’avoir la même.
- Inconvénient : Si vous ne vous dépêchez pas de signer le bon de commande, il le fera peut-être quand même avant vous.
- Alternative : les sublimes Ferrari Monza SP1 et SP2.
Ariel Atom
Restons dans l’exclusif avec cet engin qui se paye le luxe de dispenser non seulement le toit et les portières, mais aussi la carrosserie. Doté d’une structure tubulaire apparente, l’Atom est en effet à l’automobile ce que le squelette en plastique à l’échelle 1 est aux cours d’anatomie. Une anatomie justement guère protégée à bord de ce curieux insecte motorisé, que ce soit des éléments ou des conséquences d’un crash, surtout avec les 300 voire 500 chevaux auxquels son poids plume de 650Kg peuvent être associés suivant la motorisation choisie.
- Avantages : vous fera perdre du poids, en raison d’un pilotage particulièrement physique.
- Inconvénients : vos cheveux aussi
- Alternative : l’Ariel Nomad. La même dinguerie, en version Tout-terrain.
Un taxi capresi
Pour ceux qui souhaitent profiter du plaisir de rouler à découvert sur la banquette arrière, je recommande de prendre un taxi à Capri. Mais autant vous le dire tout de suite, attendez-vous à du bizarre, entre les Fiat Marea allongées sans toit, et les Scudo, Nissan Prairie ou autres Citroën C4 Picasso converties en cabriolet, et souvent "agrémentées" de selleries bariolées du style "Pimp my Car".
- Avantage : TCO ("Total Cost of Ownership") réduit à zéro.
- Inconvénient : Votre photo sur Insta en taxi à Capri, c’est fini. Pour votre réputation évidemment.
- Alternative : Des vacances ailleurs.
Voilà, ce guide est maintenant terminé. Et je ne vous cache pas mon impatience de savoir ce que les nombreux lecteurs qui l’utiliseront auront choisi. Mais que tous se rassurent, je recommencerai à donner mon avis sur tout dès la prochaine chronique.
August 25, 2020 at 05:18AM
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