« C’est complet. Revenez juste avant le service, il y a toujours quelques tables libres, mais je ne peux pas les attribuer à l’avance. » Il est onze heures et demie au Jardin des Plantes, à Paris (Ve), et devant la grande terrasse verdoyante de Manzili, le restaurant éphémère de Mohamed Cheikh, le gagnant de Top Chef 2021, Lucille a déjà répondu à une dizaine de personnes.
Emmanuelle et sa fille Marion décident d’attendre sur place. « J’essaye de réserver depuis plusieurs jours sur Internet, impossible, j’ai vu que le midi on pouvait tenter et que c’était premier arrivé, premier servi. On est les premières, ça devrait aller », glisse la mère. « On a suivi l’émission et pour nous, Mohamed méritait de gagner, intervient Marion. Il dégageait quelque chose, la passion de son métier et le plaisir du partage, de l’humilité aussi. »
Avec près de 400 couverts par jour, Manzili - « ma maison » en arabe littéraire – est complet depuis le premier jour, le 1er juin. Et jusqu’au 30 juin. La réservation au-delà s’ouvre bientôt. « On est full, c’est génial, et on ne peut pas plus, note le chef. Il ne faut pas que ça devienne l’usine. »
VIDEO. Dans les coulisses du restaurant éphémère du vainqueur de « Top Chef »
Casquette à fleurs, barbe bien taillée, t-shirt noir sous tablier noir, on le suit en sous-sol jusqu’aux cuisines où officie sa brigade. Sept cuisiniers et deux pâtissières. « On fait tout maison, c’est du boulot, mais on veut que les gens se fassent plaisir, explique-t-il. Ce n’est pas de la grande gastronomie, mais plutôt une cuisine gourmande, bien faite, des poissons frais, des choses marinées avec beaucoup de goût, ce dont on a envie l’été, sans prétention, comme moi. » Il sourit. Malgré la fatigue. Depuis sa victoire, il n’arrête pas. Interview, tournage, photos, selfies… et le restaurant où il est midi et soir.
«Les restaurants leur ont manqué»
« Les gens goûtent tout, font la razzia, s’amuse-t-il. Ça se voit que ça leur avait manqué les restaurants. » Résultat il a dû acheter un autre four, ajuster certaines quantités. La patate douce, par exemple, dont il tire une mousseline sublime, il en achète désormais 100 kg au lieu de 30 par jour. C’est le coup de feu. En terrasse, Emmanuelle et sa fille sont au dessert, celui avec lequel Mohamed et Matthias Marc ont gagné la guerre des restos sur M 6. « Somptueux ! C’est une tuerie », lâche Emmanuelle. Il s’en vend au moins 150 par jour, c’est une des stars de la carte.
« Star », Emmanuel avait lâché le mot alors que Mohamed passait les voir. « Je ne suis pas une star », rectifie-t-il. « Vous êtes un grand de la cuisine », insiste-t-elle. « On essaye, mais le chemin est long. » Il est ainsi, humble et disponible après chaque service. « Pour leur montrer que je suis vraiment là, pour les remercier aussi, tout ça c’est parce qu’ils regardent Top Chef. »
Arrive Pascal, 59 ans, venu d’Albi (Tarn) avec Cathy. Lui non plus n’avait pas de réservation. Idem pour Lily et Romain, jeunes étudiants de Rouen. « Il ne restait qu’une table de quatre, on a spontanément proposé à Pascal et Cathy de la partager, raconte Romain. Quitte à y aller au culot… » Banco. « J’ai passé un super moment, autant la rencontre que le repas », s’enthousiasme Lily.
« On est étudiants et j’ai trouvé la carte abordable, poursuit-elle. On était fan de Mohamed dans l’émission, on a pu se faire plaisir sans avoir peur de la note. » Entrée et plat, ils s’en tirent pour une trentaine d’euros chacun. « C’est ça aussi l’esprit de la maison, le partage, les rencontres », sourit Mohamed ravi que ces quatre-là aient pu déjeuner ensemble.
« Vous avez amené des valeurs, le partage et le respect dont on manque tant aujourd’hui, déclare Pascal avec émotion. Je suis heureux que vous ayez gagné, vous êtes l’ambassadeur de ceux à qui on n’a dit t’as pas ta place ici, et qui ont persisté, vous donnez de l’espoir. » Mohamed reçoit les compliments et les félicitations avec humilité, surpris parfois « qu’on [l] e prenne en exemple ». « Comme voulez-vous ne pas être touché par ça. En bas, on trime, ce métier est dur, mais il est aussi merveilleux et quand tu vois le sourire des gens, tu sais pourquoi tu le fais, confie-t-il. Les restaurateurs sont des artisans du bonheur, et moi je suis restaurateur avant d’être un candidat de Top Chef. »
Il le dit ainsi, n’a pas encore intégré dans son discours que le vainqueur, c’est lui.
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